[Titre : PLUME AU VENT - Fait suite à : L'Idée Occidentale (1915) - Dates de publication : Janvier 1922 (n°1) à avril-mai 1922 (n°4) - Périodicité : mensuelle - Lieu de publication : Paris - Format : 160 x 240 mm - Couverture : Imprimée en noir sur papier bleu - Pagination : 12 pages et 20 pages pour le n°4 d'avril-mai ; pagination non suivie - Prix et abonnements : Le numéro = 1 franc ; Un an = 10 francs - Directeurs : André Mora, Jean Royère, Charles Tillac - Gérante : Charlotte Gaillard-Tillac - Collaborateurs : Olivier Colin, Maurice Coquelin, Fagus, Robert de Ganzo, Carlos de Lazerme, Fernand Mazade, André Mora, John-Antoine Nau, [Louis Norac], Jean Royère, Jules Supervielle, Charles Tillac - Adresse (Direction) : 22, rue Duroc, Paris (VII) ; puis 80, rue du Moulin-Vert, Paris (XIV) - Imprimé sur les presses de l'Imprimerie Juglard, rue Nationale, Tulle]
PLUME AU VENT
N°1 (Janvier 1922)
[Date de publication : Janvier 1922 - Couverture : Imprimée
en noir sur papier bleu (Série [Nouvelle Série], Numéro, Prix du Numéro, Date, Titre, Sommaire, Adresse de la Direction) - 2e de couverture : "Les Concerts / Plume au Vent / Nouvelle série en février 1922 / Concert Georgesco / Voir page 12 / [dessin d'une H couchée] / Plume au Vent / Est une Œuvre / de Patience / et de Foi / Abonnez-vous pour la faire vivre / Abonnement : un an, 10 francs / Les Abonnements sont reçus par : / MM. André Mora, 22, rue Duroc, VIIe / Ch. Tillac, 14, rue Saint-Jean, XVIIe / ou J. Royère, 33, rue Franklin, XVIe" - 3e de couverture : Article ("Exposition Challuleau" par Olivier Colin) - 4e de couverture : Petites annonces de Plume au Vent (Plus Vite & Meilleur Marché / Travaux dactylographiques / en tous genres / Romans, Nouvelles, etc. / Georges Bousquié, 134, avenue d'Orléans, XIVe ; Piano / Charlotte Gaillard-Tillac / 14, rue St-Jean, XVIIe ; Chant / Mona Péchenart / 6, rue Fourcade, Paris, XVe ; Violon / E. Buntschu / 22, avenue Secrétan, XIXe) ; Imprimeur - Page [1] : En-tête (Numéro, Date, Titre) - Page 12 : Imprimeur, Gérant - Pagination : 12 pages]
Jean Royère : Les deux Traditions (p. [1]-2)
John-Antoine Nau : Lettres à Jean Royère (I), lettre [datée "Porto Vecchio, 16 février 1913, Tournant de la Marine] (p. 2-4)
Charles Tillac : Deuxième triptyque de Lourdes : Le Défi (p. 5-6) ; Le Geste, sonnet (p. 6), poèmes [datés "Lourdes septembre 1921"] (p. 5-6)
*** : Impertinences : Royère s'en va (p. 6) ; La Statue du Commandeur (p. 7-8) ; Les Rosses Latines (p. 8-9)
J[ean]. R[oyère]. : La Vie Poétique : Fagus. - La Guirlande à l’Épousée [Edgar Malfère, éditeur] (p. 9-10)
André Mora : La Veuve, conte [à suivre] (p. 10-12)
J[ean]. R[oyère]. : Concert Georgesco (p. 12)
Olivier Colin : Exposition Challuleau [exposition Marcel Challuleau, Maison des Artistes, 153, Avenue de Wagram] (3e de couverture)
Document
"Les deux Traditions"
Au moment où j'écris ces lignes liminaires pour Plume au Vent, je constate mon impuissance à changer d'idéal ! La poésie est pour moi, aujourd'hui, exactement ce qu'elle était il y a vingt ans, et je ne puis concevoir une autre esthétique, même ad usum delphini, que celle de poésie pure. Je préconise toujours l'art que Baudelaire a créé, que le Symbolisme a illustré et que nous nous efforçons nous-mêmes, avec humilité, de renouveler. Si nous y réussissons, c'est dans la mesure seulement où nous aurions ajouté quelque chose de nous à cette tradition vivante !
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... Faire du classique ! Pareille chose est donc possible, cinquante-quatre ans après la mort du Maître ? Mais, l'enseigne du classicisme contemporain n'est pas seulement rouillée : c'est l'enseigne d'une fabrique de vieux meubles, comme il en existe à Saint-Servan. Rien ne manque à la contre-façon, pas même les trous de vers ! Quoi ? C'est à cette besogne de trompe-l’œil que s'amusent maintenant la plupart des revues dites littéraires, qu'elles soient de droite ou d'avant-garde ? Sans doute, puisque cette enseigne baroque abrite au moins deux sortes de faiseurs de rien !
- La Tradition dans un pays comme la France, dix siècles de la poésie la consacrent... Mais la Tradition n'est que la chaîne, à peu près ininterrompue, des esprits créateurs et le traditionnisme, érigé en système et devenu classicisme, (s'il n'est que la doctrine de l'imitation, - et que peut-il être d'autre ?) - aboutit donc à interrompre la tradition elle-même. Or, la prose et les vers de certains "maîtres" du moment sont là, qui nous sollicitent. La poésie française de ces messieurs semble bien n'être plus qu'un jeu de collège, des plus brillants d'une virtuosité parfaite et qui séduit les simples lettrés. Parallèlement, une prose sage, stricte et volontairement éteinte, d'un gris savant, nous est offerte par un auteur, toujours fêté, mais pas par les mêmes ; un artiste pourtant, mais qui veut être éternellement l'homme de proue !
... - Notre tradition, d'une poésie vitale et jaillie du vierge aujourd'hui s'oppose absolument à ce classicisme à la mode, car l'art que les symbolistes, ont reçu de Baudelaire et aussi de Mallarmé, de Rimbaud, de Verlaine et de Laforgue, ils en ont enrichi la tradition française et ce fut leur grande tâche. Moréas acclimate notre art dans des siècles romans et classiques ; Kahn le fait pénétrer dans les déserts et dans la foule, dans les palais nomades et dans ceux du rêve ; Verhaeren en illustre les mythes anciens et modernes ; Stuart Merrill en nourrit la légende ; Vielé-Griffin et Henri de Régnier lui annexent l'Hellade, notre mère ; et Claudel en enrichit le théâtre !
Enfin, John Antoine Nau, récemment nous dota de l'Espace ; il nous découvrit, en même temps que les forêts, les îles, les mers des Tropiques - un monde - il nous ouvrit, par sa nostalgie même l'infini rayonnant, la suavité, déjà ! de la Beauté idéale.
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En allégeant la poésie de tout ce qui n'est pas essentiel, nos maîtres ne laissent plus au poète d'autre tâche que l'Absolu. Ils revêtent de mysticité la sensualité même, et ils donnent à la chair comme un goût d'infini. Mallarmé tend à l'idée pure par les voies de l'impressionnisme. Moi-même, depuis vingt ans, je n'ai vu dans la poésie qu'une sorte de substitut de la Grâce ou les langues de la Pentecôte ! Car la poésie n'est pas un art stérile ! C'est pourquoi, nous nous tiendrons ici, comme l'a dit si bien Charles Tillac "au seuil des mystères de l'âme". Donner un sens à la beauté cosmique, c'est lui découvrir un visage métaphysique. C'est donc vers un art nouveau de la nature que nous nous efforcerons, Tillac, Mora, Delteil, De Ganzo, Colin, et moi-même, à la suite de Nau, dont la poésie est religieuse et suave. Mais, puisant notre inspiration aux sources de la plus haute spiritualité, nous nous savons asservis, pourtant, à une esthétique selon laquelle un poète n'existe que s'il est un maître. C'est une garantie contre l'imitation de qui que ce soit dans une atmosphère mystique respirée ensemble.
Jean ROYÈRE.
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