Pour répondre à toutes vos questions, d'ailleurs bien intéressantes et qui éveillent en moi tant de souvenirs, - il faudrait des pages sans nombre ! Vous m'excuserez si j'essaie d'être bref.
Je suis comme tout le monde : j'ai fondé, en mon temps, de nombreuses revues. A 17 ans, Maurice Le Blond et moi, nous avions déjà donné l'essor à l'
Académie Française, dont il a paru 2 numéros, et à l'
Assomption qui, je crois bien, ne dura guère plus. Mais mon ambition se développant, je voulais être moi-même, et tout seul, dans un organe destiné à ne manifester que ma propre pensée, et ce fut l'
Annonciation, que je rédigeai seul. Le 1er n° date de juin 1893, et j'étais en Suisse, à Berne. Le deuxième est du mois d'août ; j'habitais à Oberhofen, sur le lac de Thonne. Puis, rentré à Paris, j'en fis paraître encore deux fascicules. Parmi les proses présentées là, je noterai une Apologie du poète pontifical, et divers fragments sur la littérature qui tous indiquent très nettement ce sens de l'apostolat, ce désir d'embellir la vie par la poésie, cette conception que l'écrivain est l'interprète de la vérité et de la nature, dont, bientôt - et à travers ces publications juvéniles - devaient s'engouer quelques-uns des jeunes de l'époque. Une revue, le
Rêve et l'Idée, qui parut en 1894-1895, servit de transition. Nous commencions à nous connaître, Albert Fleury, Georges Pioch, de Rosa, et nous, et dans le 1er n° des
Documents sur le Naturisme, publié en juin 1895, par Maurice Le Blond, on donne plusieurs de ces noms, qui sont ceux des réels créateurs du mouvement.
Les
Documents sur le Naturisme devaient paraître un an environ. C'est, de toutes nos revues, celle qui me reste la plus précieuse et la plus chère. Nous n'avions pas vingt ans et notre sincérité excluait de nos préoccupations toute question d'intérêt ou d'amour-propre, notre camaraderie était grande et sans nuage. Nous prétendions rénover l'art, et nous avions foi les uns dans les autres. Plus tard, le mouvement naturiste s'est développé ; il s'est annexé des valeurs comme Montfort et Gasquet qui sont chacun devenus des maîtres ; on peut dire que toute une génération en a été un moment imprégnée. Mais rien ne vaudra dans mon souvenir le groupe du début, qui était peu nombreux mais si ardent et si noble !
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