vendredi 15 février 2013

POÈMES DE FRANCE N°4 - 15 JANVIER 1915

POÈMES DE FRANCE
N°4 (15 Janvier 1915)
[Date de publication : 15 janvier 1915 - Couverture : Sans (en-tête sur la première page) - Page [25] : En-Tête (Périodicité, Numéro, Sous-Titre, Mention ["Ne se vend que par Abonnement"], Titre, Année, Rédacteur, Dépôt, Abonnement, Date, Adresse) - Bas de Page [32] : Imprimeur, Gérant - Pagination : 8 pages]
Sommaire
Paul Fort : La Victoire de la Marne [A Léon Bourgeois - daté "Septembre 1914"] (p. [25]-28)
Paul Fort : Le saint peuple belge [A mes amis Dumont-Wilden et Fuss-Amoré - daté "Janvier 1915"] (p. 28-29)

Paul Fort : L'écharde de Napoléon ou l'inutilité de Blücher à Waterloo (conte de 1815, pour lire en 1915, dans les tranchées) [A Georges d'Esparbès] (p. [30]-32)

mercredi 13 février 2013

POÈMES DE FRANCE N°3 - 1er JANVIER 1915

POÈMES DE FRANCE
N°3 (1er Janvier 1915)
[Date de publication : 1er janvier 1915 - Couverture : Sans (en-tête sur la première page) - Page [17] : En-Tête (Périodicité, Numéro, Prix, Titre, Année, Rédacteur, Dépôt, Abonnement, Date, Adresse) - Bas de Page [24] : Imprimeur, Gérant - Pagination : 8 pages]
Sommaire
Paul Fort : Ce que nous défendons [A Lucien Guitry - daté "15-16 Novembre 1914"] (p. [17]-19)
Paul Fort : Vendanges de 1914 (D'une amante à son amant) [A Carol-Bérard - "Écrit en Septembre"] (p. [20])

Paul Fort : La Manière (p. [20])

Paul Fort : Le chant des Anglais [En épigraphe : "It's a long way to Tipperary" - daté "Décembre 1914"] (p. [21]-22)
Paul Fort : Officiers prussiens [en épigraphe, citation de Rabelais : "Qui serait Monsieur sans queue ?"] (p. 22)

Paul Fort : Dispute (p. [23])

Paul Fort : Pour quelques-uns [daté "Septembre"] (p. [24])

Paul Fort : Berceuse pour endormir la folie du dernier empereur d'Allemagne [A Léo Sachs - daté "1914"] (p. [24])

dimanche 10 février 2013

POÈMES DE FRANCE N°2 - 15 DÉCEMBRE 1914

POÈMES DE FRANCE
N°2 (15 Décembre 1914)
[Date de publication : 15 décembre 1914 - Couverture : Sans (en-tête sur la première page) - Page [1] : En-Tête (Périodicité, Numéro, Prix, Titre, Année, Rédacteur, Dépôt, Abonnement, Date, Adresse) - Bas de Page 16 : Imprimeur, Gérant - Pagination : 8 pages]
Sommaire
Paul Fort : La Clarté de France [A Victor Margueritte - daté "15-16 Novembre 1914"] (p. [9]-11)
Paul Fort : Sur la mort d'Olivier Hourcade (tué à l'ennemi devant Soissons) [A FRANCIS JAMMES - en épigraphe, citation des Journaux de septembre 1914 : "Ce jeune poète, ce prêtre futur, était parti avec joie et même avec enthousiasme... Il vient de mourir, frappé d'un éclat d'obus, au cours d'une mission de confiance dont, sur sa prière, son général l'avait chargé." - daté "Le 29 Septembre 1914"] (p. [12]-13)

Paul Fort : Senlis vengée [A Georges Lecomte - en épigraphe, citation de Senlis matinale de Paul Fort : "Je sors. La ville a-t-elle disparu ce matin ? Où s'est-elle envolée ? (...) où Dieu repose un front qui vers Senlis se penche." - daté "Le 12 Septembre 1914"] (p. [14]-16)

Paul Fort : Le Soldat de grand'garde [A Alphonse Lenoir] (p. 16)
Document
A FRANCIS JAMMES
SUR LA MORT D'OLIVIER HOURCADE
(tué à l'ennemi devant Soissons)
Dieu nous l'a pris qui l'aimait tant. Plus que nous qui l'aimions pourtant, et non par feinte ou fantaisie, hélas ! avec tout notre cœur - de nous n'a-t-il pas dit aussi : Seigneur, aimez qu'en poésie tous deux ils soient mes doux seigneurs ? - bien qu'il ait dit cela, hélas ! prouvé toujours, chanté cela, plus que nous Dieu l'aimait déjà : trop ? non ! c'était son enfant. Dieu nous l'a pris qui l'aimait tant.

Jésus et l'Art, ô viatiques de cette jeune âme en voyage, toute ferveur, tout héroïque, née pour de surhumains courages, pensive gaîment, sans critiques, et se donnant en vous donnant, libres vertus en république, apaisées de rêve tremblant : spontanéité, charme, élan ! et l'Art et Dieu pour viatiques ! Dieu l'a "saisi" qui l'aimait tant...

Combien, tresseur de ses lauriers, je tresse haut pour Olivier ! Un éclat d'obus a frappé le plus noble cœur de poète, à travers l'Art même occupé des plus hautes pensées secrètes. Je vois si haut mon Olivier, d'un berceau d'anges abrité, montant, montant à la conquête de la seule immortalité. Je tresserais haut ses lauriers, mais au bord du ciel arrêtés, mes doigts ne suivent plus sa tête... Dieu m'a repris tout mon poète.

Il a bien fait. C'était "le sien". Dieu terrible a repris son bien, aux signes d'un ange gardien ouvrant deux ailes tout heureuses et divinement lumineuses sur l'enfant mort de son haut fait. Il a repris le bel enfant à son moment le plus parfait, devant son ange triomphant, lorsque deux fois héros, Hourcade, par double amour et non bravade - ayant conquis la mission digne de son Ambition - aux appels de l'Agnus Dei voulut mourir pour son pays !

Toi, mon Jammes du Paradis, continue de tresser pour lui : c'est à moi seul que Dieu l'a pris. Las ! éternellement perdu, je ne verrai plus mon ami ! Tu sais, Jammes, où il ira. Et c'est, plus tard, où tu seras. Tu sais, Jammes, où il s'en va dans ces vols d'anges éperdus. A toi de tresser sa couronne... Mais tu souris, Dieu me pardonne, toi qui déjà peux dire aux hommes, de cet Olivier que tu vois avec ton âme, avec ta foi : "Non perdu. Se retrouvera."

Hélas ! puisqu'il en est ainsi, que je dois seul être puni - car ses père et mère seront, menant le chœur de ses amis, de ceux-là qui le reverront - lorsqu'au ciel tu le reverras, cet Olivier de notre cœur, sais-tu qu'il me demandera, disant : "Je l'aimais bien aussi ! Cherche-t-il nos félicités ?" Je t'en prie, ne lui fais de peur. A mon ami ne fais de peine. Et lorsque tu lui répondras, ne lui dis pas que mes blasphèmes des paradis m'ont écarté. N'affirme rien, hors que je l'aime. Trouve-lui les mots fraternels ne chargeant point trop son aîné. Ne charge point le condamné. Dis-lui que loin de l’Éternel, en mission vers les Damnés, pour toujours loin de son doux ciel, absent je l'aime bien quand même... et pleurez l'ami regretté.

Dieu me l'a pris, l'Ami que j'aime, - me l'a pris pour l'éternité !
Le 29 Septembre 1914.

samedi 9 février 2013

LA PRESQU'ÎLE N°6 (3e SÉRIE) - SEPTEMBRE 1918

A la mémoire de l'ami Bruno Leclercq
qui me fit découvrir La Presqu'île 
LA PRESQU'ÎLE
Troisième Série, n°6, septembre 1918
[Date de publication : Septembre 1918 - Couverture : Titre, Sous-Titre, Prix, Série, Numéro, Date - 2e de couverture : muette - 3e de couverture : Annonce publicitaire (Le Courrier de la Presse) - 4e de couverture : Gérant (J. Gamon) - Fronton (Page [1]) : Titre, Sous-Titre, Prix, Abonnement, Mentions ("Le directeur de La Presqu'île, M. Philippe REYNIER, ainsi que les autres collaborateurs étant tous au front, les lettres et manuscrits concernant la Revue ainsi que les abonnements doivent être adressés à M. P. BEGLARIAN, administrateur, 73, Avenue de Breteuil, Paris (XVe). Tel. Saxe 72-50. / La Presqu'île, revue du front est ouverte à tous les poètes et écrivains qui, à l'heure présente, se battent sur terre ou sur mer."), Sommaire - Bas de Page [32] : Errata du numéro d'Août ; Imprimeur (Le Puy. - Imprimerie Peyriller, Rouchon et Gamon) - Pagination : 32 pages]
Sommaire
NOTRE ENQUÊTE
Nous continuons la publication des réponses qu'a suscitées notre enquête et nous regrettons vivement de ne pouvoir les publier toutes ou du moins dans leur intégralité. (p. [1])
Ranz : [Réponse à l'enquête], lettre (p. [1]-2)
Raymond Roussel : [Réponse à l'enquête], lettre [datée "Aux Armées, juin 1918"] (p. 2-5)
André Bernard, Paul Giraud, Jean Seignol, Paul Charrier : [Réponses à l'enquête], citations [suivi de cette note de la rédaction : "Nous avons reçu également des lettres de MM. Frédéric Jacob, Jean Desgournaux, Roger Goudard-Séverac, Étienne Peux, J. Brézé, Alphonse Fressens, etc., etc. Seul le manque de place nous interdit de les publier. Nous espérons pouvoir, la prochaine fois, tirer les conclusions de notre enquête et remercier nos aimables correspondants de nous avoir aidé à la mener à bien."] (p. 5-7)
G. Mouren : Scolier, poème [en épigraphe, citation d'Asclépiade de Samos : "Buvons le vin pur de Baedros ; l'aurore commence à poindre. Si la lampe s'est éteinte, veux-tu attendre son réveil ? Buvons gaiement ! Encore quelques jours, malheureux, nous aurons la grande nuit pour nous reposer."] (p. 7-8)
Philippe Reynier : Goutte de Clarté au pays des destinées simples,conte  ["A Jean Sylveire, pour qui ce conte fut écrit"] (p. 8-16)
Gilbert Landes : Notes fantaisistes (p. 16)
Raymond Payelle : Andante Doloroso, poème (p. 17)
Raoul Rascle : Vus par nous : Les ministres espagnols (p. 18-20)

Louis Castel : Héroïsme et Gratitude (p. 20-22)
Ker-Frank-Houx : La Maison d'édition des Jeunes, lettre [datée "La Chézine, ce 21 juillet" - suivie de cette note signée P[hilippe]. R[eynier]. : "A cet exposé parfaitement clair d'un projet digne d'attention je me permettrai de faire une critique. Parmi les revues actuellement en vogue il en est plusieurs dont la médiocrité ne pourrait que desservir les jeunes auprès du public qu'il s'agit d'atteindre. La maison d'édition de Ker-Frank-Houx les accueillerait-elle ? Oui, sans doute, et là me paraît le point faible de l'argumentation. La parole est d'ailleurs aux jeunes. La Presqu’Ile tiendra compte des avis qu'ils voudront bien lui faire parvenir."] (p. 23-26)

Georges Ferré : Le Sacrifice, poème (p. 26-28)
*** : Livres et Revues [La jeune poésie française (Crès, boulevard Saint-Germain), Frédéric Lefèvre - p. 29-30 ; Les Trois Roses (revue), 11, rue Thiers, Grenoble (juillet) : Max Jacob "médite" avec originalité "sur sa Mort". Les idées ne sont pas très neuves mais exprimées du moins avec une certaine recherche. André Breton dans "Age" et Paule (sic) Dermée dans "Nocturne" bavardent assez musicalement pour des gens qui n'ont rien à dire. Nous signalerons enfin "Lyrisme" de Jean Royère, beaux vers dans la manière de certaines pièces du poète Charles Cousin que La Presqu'Ile eut l'idée saugrenue d'enterrer il y a trois mois. - p. 30 ; La Veilleuse (revue), directeur, M. Jourd'heuil, 7, Petite rue Saint-Jean, Châtellerault (juillet) : Marcel Sauvage écrit gracieusement mais emploie trop d'adjectifs... - p. 30 ; Les Humbles (revue), directeur, Maurice Wullens, 4, rue Descartes, Paris (juillet) : Les Humbles publient des vers jolis, mais quelque peu banals de Jean de Saint-Prix et un appel assez incompréhensible de Stefan Zweig, dans lequel l'écrivain autrichien se courrouce contre les faux pacifistes de son pays : "Pacifistes d'hier et internationalistes qui surgissent tout d'un coup", parce qu'ils en ont assez de la guerre, supposons-nous. Mais après tout, que cela soit par lassitude ou par principe que l'idée de la paix fasse son chemin en Autriche, quelle importance cela a-t-il pour M. Zweig ? L'essentiel pour lui n'est-ce pas la cessation du massacre ? Les "Menus Propos" de Maurice Wullens contiennent des vérités élémentaires que généralement on laisse trop facilement dans l'ombre. Le directeur des "Humbles" ne craint pas de s'élever contre le dogme léniniste du "peuple, classe parfaite". Il a l'audace, car pour certains, c'est de l'audace, de dire qu'il connaît des bourgeois et des nobles, ne vous en déplaise Trotsky, qui sont beaucoup plus intéressants que la masse des "soldats, ouvriers et paysans". Ce qui rend le socialisme aussi ridicule que le régime bourgeois actuel, c'est cette obstination à faire des travailleurs une classe parfaite, et à ne pas comprendre que les hommes d'élite y sont aussi rares que dans les classes aisées... - p. 30-31 ; Ariste (revue), directeur, Ker-Frank-Houx, avenue de la Chézine, Nantes (juillet) : Nous savons gré une fois de plus à Ker-Frank-Houx d'avoir consenti à ne donner à ses "essais" qu'un volume restreint et d'avoir voulu que chaque page publiée soit une perfection de langue et de goût..... - p. 313 ; L'Affranchi (revue), 81, rue Dareau, Paris (juillet) : Dans l'Affranchi deux beaux et bons articles à noter, "la même Guerre, mais une autre Vérité" que signe de Labunowo et quelques notes anonymes sur Kerensky. Le numéro est d'ailleurs presque entièrement consacré à la Russie et à sa défense et nous nous réjouissons de voir enfin des hommes de bon sens et non de parti montrer un peu d'indulgence pour une révolution qui ne portera que plus tard ses fruits et n'en est pas moins, malgré ses résultats immédiats, un bel acte d'émancipation. - p. 31 ; Le Verbe (revue), 204, Avenue du Maine, Rédacteur en chef : M. A. Romane (août) : Le Verbe est une intéressante revue qui publie de méchants vers et de jolies proses... - p. 32 ; Les circonstances nous obligent à remettre au mois d'octobre la "Permission" de M. Griner et la suite de "Nos relations avec l'Espagne" de M. Meillard.] (p. 29-32)
Document
"Notre Enquête : Réponse de Raymond Roussel"
Ce que mentalement et moralement sera le Français de demain ?... Mais à vous lire il semblerait qu'il pût exister une unité (perfection entre toutes) dans l'Esprit d'un peuple entier, d'un peuple malgré tout, si composite !

Si l'Union Sacrée, qui est un mot, a pu prendre des allures de fait, c'est qu'elle s'est adressée aux manifestations extérieures des opinions, mais non aux idées elles-mêmes ! Et sa raison d'être n'est pas à prouver !...

La question posée est vraiment complexe, c'est pourquoi j'hésite à y répondre !

Être historien est ardu et parfois impossible, car seuls les faits subsistent du passé ; ceux qui se bornent aux documents et aux vestiges, semblables pour tous, se voient rarement réfutés !

Conter son temps semble aisé à beaucoup d'écrivains... Et, à ce grand ensemble d'âmes inconnues et muettes, ils donnent (et c'est plus facile) des pensées communes, des sentiments et sensations uniques. C'est de la psychologie à coups de hache, et, tel qui brosse un peuple ne pourrait étudier et nuancer avec justesse et vérité le moindre détail d'un cœur. Ceux qui généralisent sur leur époque, encore, ont les éléments à proximité, ce qui ne les empêche pas, à cause de leur tempérament et leur compréhension, d'être souvent en contradiction.

Et tout cela est déduction et analyse !...

Mais être prophète !...

L'imagination, cette cause d'erreurs, a trop souvent sa part dans la synthèse !

L'intelligence, la raison sont bien pauvres devant l'avenir !... C'est comme l'allumette dont s'éclairerait un homme perdu dans un immense tunnel.

Enfin, puisque la question est posée... essayons d'y répondre !...

Malgré les mille ruisselets qui se branchent et puis, parfois se rejoignent, je ne veux voir que deux fleuves d'idées, mais deux fleuves qui prendraient leur source, en dépit de la géographie, à leur confluent !...

Ceux qui savent
Ceux qui ne savent pas !

Ceux qui savent ?... ceux qui en ce moment souffrent, ceux qui, devant la mort, ont la notion plus exacte des valeurs relatives ! ceux pour qui la douleur côtoyée et éprouvée a été un coup de fouet à la sensibilité et à la raison ; ceux aussi qui, n'ayant eu que des échos lointains du grand drame, en ont saisi quoique cela les beautés et l'horreur, le sublime et le bestial !...

Ceux qui ne savent pas ?... ceux qui ne peuvent et ceux qui ne veulent pas savoir ; ceux pour qui la souffrance des autres ne leur aura été qu'extérieure ; les égoïstes, les indifférents, les ignorants ; ceux qui s'extasient de la bonne mine du combattant et s'étonnent de la rapidité avec laquelle ces quatre mois (ou plus), pendant lesquels il a souffert, lui, se sont écoulés ; ceux qui s'élèvent en un idéal éthéré et qui ne veulent pas voir la boue, le sang, la plaie et le carnage ; ceux qui ne sont pas "humains" mais qui naviguent en plein rêve !...

De ces deux grandes divisions, laquelle est la plus forte ?

Pour moi, c'est la première, car rares sont les Français que la guerre n'a pas éprouvés. Et c'est celle qui triomphera car elle possède la vérité !

Mais il y aura lutte entre ces partis et elle promet d'être chaude !

L'homme que la mort aura frôlé voudra vivre heureux !

La mort apprend à vivre !

Mais l'homme est faible et ses idées sont variables ; la vie et toutes ses exigences est une grande niveleuse, elle tempère !

Cependant l'esprit qui sera assez énergique (et c'est une qualité qui se développe) pour conserver, envers et contre tous les émollients de l'existence, les enseignements de la guerre et les résolutions prises, ira droit au but qu'il s'est fixé ! Et il apprend en ce moment à être fort ; parfois il devient même implacable car il s'endurcit !... Il lui faudra du vrai, donc du beau : le vrai après l'erreur et le beau après le laid !...

S'ils ne se taisent eux-mêmes, il fera taire ceux qui, seuls, ont la possibilité et la facilité en ce moment d'émettre des idées en contradiction avec les siennes !...

Il appuiera ses paroles sur des faits, il sera réaliste.

Les vieilles idées, les vieux préjugés, les conceptions étroites auront vécu !...

Les hautes idées deviendront pour lui plus humaines et moins mystiques. Son idéal ne sera pas dans les régions éthérées et pratiquement inaccessibles, mais bien assis sur un socle de marbre pur !

La guerre, pas plus que la science, n'aura porté un coup à la poésie ; elle l'aura orientée différemment ! Si la science en détruisant beaucoup de sources poétiques devenues désuètes, en fait naître d'autres, la guerre aura agi de même !...

Et ces sources correspondront à leur époque !

Ce que je dis pour la poésie, je le pense et le dis pour toutes les manifestations artistiques de la sensibilité. Et il y aura un essor puissant, car dans le grand orage nombre d'âmes se seront révélées à elles-mêmes et brûleront de se faire entendre !

De plus, la guerre aura rendu, en général, le Français moins impulsif, moins "emballé" et aussi plus prévoyant ; certains seront devenus plus fermes, plus tenaces, et d'autres, hélas, plus passifs !

Une autre grosse question se pose, et non des moindres :

L'homme appellera-t-il "Providence" ou "Hasard" cette force dont il aura senti la puissance et dont il aura constaté les effets près de lui, pendant ces années où la précaution, la prudence et les armures, toutes ces protections contre le danger n'auront été que secondaires !

Eh bien ! je crois que pour cela comme pour toutes ses aspirations et croyances il aura une conception plus humaine.

En général, l'athée d'avant-guerre ne pourra pas, sincère avec lui-même, après tout ce qu'il aura vu ou entendu, nier l'intelligence de cette force ! Il sentira une Raison équilibrée, mais il la placera au-dessus des religions, qui se refusent à être des formes appropriées aux temps et aux êtres, de la Vérité.

Or le croyant, de quelque culte qu'il soit, aura éprouvé les mêmes impressions. En la comprenant comme elle doit l'être il s'élèvera au-dessus de sa religion.

De nouveau le Vrai, le Beau dans une forme plus humaine et moins mystérieuse seront son aspiration.

La religion du Français de demain sera celle de la Bonté, de la Pitié, de la Justice, purement et simplement, car les formes il les aura reconnues inférieures à la Matière, à l'Essence, à l'Idée !

Il est Homme et voudra, l'ayant bien compris, qu'on le traite comme tel.

Voilà quel aura été, à mon avis, le grand pas accompli dans le Progrès de la Pensée, durant cette guerre que nous vivons !
Raymond ROUSSEL.
Aux Armées, juin 1918.

mercredi 6 février 2013

LA PRESQU'ÎLE N°5 (3e SÉRIE) - AOÛT 1918

A la mémoire de l'ami Bruno Leclercq
qui me fit découvrir La Presqu'île 
LA PRESQU'ÎLE
Troisième Série, n°5, août 1918
[Date de publication : Août 1918 - Couverture : Titre, Sous-Titre, Prix, Série, Numéro, Date - 2e de couverture : muette - 3e de couverture : Annonce publicitaire (Le Courrier de la Presse) - 4e de couverture : Gérant (J. Gamon) - Fronton (Page [1]) : Titre, Sous-Titre, Prix, Abonnement, Mentions ("Le directeur de La Presqu'île, M. Philippe REYNIER, ainsi que les collaborateurs étant tous au front, les lettres et manuscrits concernant la Revue ainsi que les abonnements doivent être adressés à M. P. BEGLARIAN, administrateur, 73, Avenue de Breteuil, Paris (XVe). Tel. Saxe 72-50. / La Presqu'île, revue du front est ouverte à tous les écrivains et poètes qui, à l'heure présente, se battent sur terre ou sur mer."), Sommaire - Bas de Page [24] : Imprimeur (Le Puy. - Imprimerie Peyriller, Rouchon et Gamon) - Pagination : 24 pages]
Sommaire
NOTRE ENQUÊTE
Nous continuons la publication des nombreuses lettres qui nous sont parvenues au sujet de notre enquête, nous espérons la clore prochainement et résumer, pour nos lecteurs, les opinions si diverses, mais toutes intéressantes de nos correspondants. (p. [1])
Octave Béliard : [Réponse à l'enquête], lettre (p. [1]-2)
André Bel-Sauger : [Réponse à l'enquête], lettre (p. 3)
Camille Cottet : [Réponse à l'enquête], lettre [datée "22 juin 1918"] (p. 3-4)
Émile Cagin : Lettre à Jules Joëts, poème [datée "Messine, avril 1918"] (p. 4-6)
Raymond Payelle : Histoire d'une grenouille verte et d'un orteil rose,conte  ["Pour Paul Dussart, Souvenir des cloaques de Belgique 1917"] (p. 7)
G. Moureu : Le vaisseau d'Osiris, poème (p. 8)
Jean Griner : La permission : arrivée à Paris, récit [A suivre] (p. 8-9)
François-Marc Meillard : Nos relations avec l'Espagne [A suivre] (p. 9-11)

Robert Boudry : Brouillard, poème [note : "D'un volume à paraître "Les élégies d'André Sélière"] (p. 11-12)
Pierre Vervieux : L'épreuve, conte [A mon ami Jean Neyrolles] (p. 12-14)

R[aoul]. R[ascle]. : Vus par nous : Charles de Freycinet (p. 14-16)

Frédéric Lefèvre : Dolente amie [A Ker-Frank-Houx] (p. 16-18)

R. Boggio : Les Exilés, poème [A Raymond Payelle] (p. 18-19)

P[hilippe]. R[eynier]. : Max-François Poncet (1898-1918) (p. 19-20)
G. : Livres et Revues [Poèmes, édition du Scarabée, 83, rue de la Tombe-Issoire. M. E. Cagin - p. 21 ; A propos du Rome sans Canossa. M. de Monzie - p. 21-22 ; Le Scarabée (juillet et août 1918), revue : Il nous faut louer d'abord la couverture de ce recueil. Titres principaux en lettres rouges ; au centre le curieux et synthétique scarabée de Marguy. Le contenu nous paraît moins digne d'intérêt... - p. 22-23 ; Soi-même (juin) : "Dans le Soi-même de juin, un amusant rondeau d'Edmond Adam. Des gens bien intentionnés accuseraient peut-être Edmond Adam de défaitisme s'il écrivait comme tout le monde mais le moyen âge excuse tout... - p. 23 ; L'Affranchi (juin) : Nous recevons le numéro juin de l'Affranchi dont la mise en page est d'une austérité déconcertante. Oserons-nous conseiller aux deux ou trois graves Messieurs qui publient dans cette revue de présenter leurs articles de plus avenante façon... - p. 23-24 ; Ariste (juin) : L'Affranchi dont nous parlions tout à l'heure devrait prendre exemple sur Ariste tout au moins pour la mise en page. Le moindre détail en est soigné et Ker Frank Houx a compris qu'avoir du talent ne suffit pas et qu'il faut encore le savoir mettre en évidence... - p. 24 ; Les Trois Roses (juin) : Les Trois Roses publient de nombreuses pièces de vers dont la régulière irrégularité déconcerte et fatigue très vite. Vieillé-Griffin (sic) a trouvé un rythme court, mais émouvant pour la troisième strophe de son In Memoriam John-Antoine Nau. Nous ne pouvons en dire autant malheureusement des trois autres qui sont d'une banalité sans excuses. Les Astres nouveaux de Reverdy sont pénibles à lire et encore plus à comprendre grâce à leur bizarre composition ; les lignes semblent se fuir mutuellement et les yeux exaspérés se détournent enfin lassés par une gymnastique à laquelle le titre ne les avait préparés qu'à moitié. Nous préférons passer rapidement sur les fantaisies de Max Jacob dont la baroque insipidité ne rachète pas l'ennui et pour terminer nous mentionnerons simplement le très beau poème de Jean de Cours, Des Routes, d'une tristesse et d'une mélancolie discrètes? - p. 24] (p. 21-24)

dimanche 3 février 2013

LA PRESQU'ÎLE N°4 (3e SÉRIE) - JUILLET 1918

A la mémoire de l'ami Bruno Leclercq
qui me fit découvrir La Presqu'île 
LA PRESQU'ÎLE
Troisième Série, n°4, juillet 1918
[Date de publication : Juillet 1918 - Couverture : Titre, Sous-Titre, Prix, Série, Numéro, Date - 2e de couverture : muette - 3e de couverture : Annonces publicitaires (Le Courrier de la Presse ; "Amputés de la main droite, qui souffrez de ne plus pouvoir écrire, servez-vous du "MANOSTYL". Deux hommes, deux Français ont pensé à vous, dont l'un, le sous-lieutenant Marson est amputé comme vous, et frère de votre douleur. Pour vous ils ont inventé le simple, pratique et aisé "MANOSTYL"...) - 4e de couverture : Gérant (J. Gamon) - Fronton (Page [1]) : Titre, Sous-Titre, Prix, Abonnement, Mentions ("Les lettres et manuscrits concernant La Presqu'île, ainsi que les abonnements et cotisations doivent être adressés à M. P. BEGLARIAN, 73, Avenue de Breteuil, Paris (XVe). Tel. Saxe 72-50. / (Les manuscrits non insérés sont rendus sur demande) / La Presqu'île, œuvre d'union artistique, fait appel à la générosité de ses amis. Elle a besoin de l'appui et de l'aide de tous pour vivre et devenir une force."), Sommaire - Bas de Page [20] : Errata ; Imprimeur (Le Puy. - Imprimerie Peyriller, Rouchon et Gamon) - Pagination : 20 pages]
Sommaire
NOTRE ENQUÊTE
Nous avons reçu encore un grand nombre de lettres montrant l'intérêt qu'a suscité notre enquête un peu partout et surtout au front.
La place ne nous permet d'en publier que trois ou quatre cette fois-ci, lesquelles sont d'ailleurs très caractéristiques de celles que nous recevons journellement. (p. [1])
A. Gabriac de Ginals : [Réponse à l'enquête], lettre (p. [1]-3)
André Roussel : [Réponse à l'enquête], lettre (p. 3-4)
Job Breiz : [Réponse à l'enquête] (p. 4-5)
Marcel-Edmond Naegelen : [Réponse à l'enquête], lettre [extraits] (p. 5-6)
Raymond Payelle : La Reine dort, poème [A Philippe Reynier] (p. 6)
R[aoul]. R[ascle]. : Vus par nous, lettre [précédée de la note suivante : "Nous devions publier, dans ce numéro, un portrait de M. Painlevé, écrit par notre ami et collaborateur Raoul Rascle, voici la lettre qu'il nous envoie au dernier moment :" - datée "Au front, 10 juin"] (p. 7)
Philippe Reynier : Autre conte à un homme profond, conte (p. 8-9)
Henri Bride : Je songe aux fins d'automne..., poème [en épigraphe, citation de Jean Moréas : "Je songe aux ciels marins, à leurs couchants si doux"] (p. 9)
Jean Griner : La permission : départ du front, récit [A suivre] (p. 9-15)
Roger Barbot : Rancœur, poème (p. 15)

Georges-G. Joutel : Le vieillard et les jeunes filles, conte (p. 16-17)
G. : Livres [Némésis, roman de M. Paul Bourget (Plon-Nourrit, Paris) - p. 18-19 ; Quelques réflexions sur M. Britling : M. Britling voit clair, H. G. Wells - p. 19-20 ; "Nous espérons parler la prochaine fois des revues "Soi-Même", "Ariste", "L''Affranchi" ainsi que des "Poèmes" de M. E. Cagin"] (p. 18-20)

samedi 2 février 2013

POÈMES DE FRANCE N°1 - 1er DÉCEMBRE 1914

[Titre : POÈMES DE FRANCE - Sous-titre : Bulletin lyrique de la guerre - Dates de publication : 1er décembre 1914 (n°1) au 1er janvier 1917 (n°30) - Périodicité : Bi-mensuelle avec une longue interruption entre le n°26 (15 janvier 1916) et le n°27 (1er septembre 1916) à partir duquel la parution est mensuelle - Lieux de publication : Paris - Format : 250 x 160 mm - Couverture : sans - Pagination :  8 pages - Prix et abonnements : Ne se vend que par abonnement ; Abonnement d'un an (24 numéros) = 5 fr. (France), 6 fr. (Étranger) ; à partir du n°27 : Les 48 numéros = 12 fr. (France), 14 fr. (Étranger) - Directeur : Paul FortRédacteur unique : Paul Fort - Adresse : 125, Boulevard Saint-Germain ; puis, à partir du n°25 (deuxième année) : 6, Rue Sophie-Germain (XIVe) ; puis à partir du n°27 : 34, Rue Gay-Lussac (Ve) - Gérant : Paul Fort - Dépôt : En vente chez R. Helleu ; puis à partir du n°27, en vente chez l'Auteur - Imprimé sur les presses de l'Imprimerie Lahure ; puis à partir du n°9 : sur les presses de l'Imprimerie du Palais, 20, Rue Geoffroy-L'Asnier (Paris)]
POÈMES DE FRANCE
N°1 (1er Décembre 1914)
[Date de publication : 1er décembre 1914 - Couverture : Sans (en-tête sur la première page) - Page [1] : En-Tête (Périodicité, Numéro, Sous-Titre, Mention ["Ne se vend que par Abonnement"], Titre, Année, Rédacteur, Dépôt, Abonnement, Date, Adresse) - Bas de Page 8 : Mention ("Dans le numéro 2, le 15 Décembre / SENLIS VENGÉE") ; Imprimeur, Gérant - Pagination : 8 pages]
Sommaire
Paul Fort : La Cathédrale de Reims [en épigraphe : "Le 19 Septembre 1914, la Cathédrale de Reims fut bombardée et incendiée par les troupes allemandes : le baron von Plattenberg, général d'infanterie, aide de camp général et chef de la garde royale prussienne, est l'auteur responsable de cet attentat." - daté "Le 21 Septembre 1914"] (p. [1]-6)
Paul Fort : La veillée du poète avant la guerre (p. 6)

Paul Fort : Aix quatre-vingt-treize "il-n'est-pas-vrai" [en épigraphe : "En octobre 1914, quatre-vingt-treize "intellectuels allemands" chantèrent pour les Nations civilisées un cantique au refrain d'"Il n'est pas vrai que... Il n'est pas vrai que... Il n'est pas vrai que...""] (p. [7]-8)

Paul Fort : Le lourd et le léger (variante d'un poème regretté) (p. 8)

vendredi 1 février 2013

LES TABLETTES N°6 - DÉCEMBRE 1911

LES TABLETTES
N°6 (Décembre 1911)
[Date de publication : Décembre 1911 - Couverture : Titre, Épigraphe (citation d'Albert Fleury : "Je pense que, de tout, et de la Douleur même, nous avons l'irrémissible devoir d’extraire de la splendeur pour nos frères futurs."), Sommaire, Fleuron, Série ("Deuxième Série"), Numéro, Date, Prix, Adresse de la Direction - 2e de couverture : Le numéro 7 des TABLETTES / sera entièrement consacré à / ALBERT FLEURY / Il contiendra des études, poèmes, etc., / relatifs à son œuvre. Il sera orné d'un / portrait du poète et d'un fac-simile de / son écriture, et complété par un choix / de poèmes et de proses, et par quelques / pages posthumes." ; Abonnements ("L'abonnement est de dix numéros formant deux séries de cinq numéros, dont chacune représente un volume de 250 pages environ. / La publication des fascicules n'est pas régulière et la durée du service de l'abonnement n'est pas limitée.") ; Prix de l'Abonnement - 3e de couverture : Œuvres d'Albert Fleury (liste) ; "On trouve Les Tablettes, à Paris : Rive gauche : chez Bénard, galeries de l'Odéon ; Rive droite : chez Stock, 155, rue Saint-Honoré, près le Théâtre-Français ; Avis : "Il nous reste quelques collections de la première Série des Tablettes. / Nous les réservons aux personnes qui auront souscrit un abonnement de deux Séries avant le 1er Février 1912. / Aucun numéro de la première Série ne sera envoyé comme spécimen. / A partir du présent numéro, nous limitons le Service à nos collaborateurs et à nos amis, aux groupements et aux revues qui nous ont assuré l'échange." - 4e de couverture : Titre, Sous-titre ("Revue littéraire absolument indépendante"), Fondateur, Rédaction, Présentation ("Les Tablettes ne sont l'organe d'aucun Groupe, d'aucune École littéraire. Elle ne relèvent d'aucune formule, et tendent seulement à être une Revue d'Art pur et de Beauté. Toutes les idées, toutes les opinions y sont accueillies pourvu qu'elles soient exprimées avec style et noblesse. / Les Tablettes ne publient que de l'inédit. / Les manuscrits non insérés ne sont pas rendus. / Chaque auteur est responsable de ses articles. / La reproduction et la traduction des matières publiées dans Les Tablettes sont réservées."), Mention ("Toutes les communications concernant Les Tablettes doivent être adressées à M. Camille SCHILTZ, 11bis, rue de Maubeuge, à Paris. / Les auteurs peuvent envoyer leurs ouvrages aux rédacteurs par qui ils veulent les voir critiqués.") - Page [1] : En-tête ("N° 6. - LES TABLETTES. - Décembre 1911") - Page 293 : Livres reçus (liste) - Bas de page 40 : Gérant, Imprimeur - Pagination : 40 pages]
Sommaire
La Rédaction : Albert Fleury [article encadré de noir] (p. [1]-4)
Fagus : La Danse macabre (fragment), poème (p. 5-8)

Georges Polti : Les saints inconnus : Reine Blanchard, nouvelle [A Fagus - en épigraphe, citation d'Edgar Allan Poe : "... Ou bien dire en termes simples une pensée inhabituelle..." - note de Camille Schiltz en pied de nouvelle (p. 18-19) : "Reine Blanchard devait paraître dans le troisième fascicule des Tablettes. J'en avais adressé le manuscrit à Albert Fleury, à une époque où ne le connaissant que par ses lettres admirables de foi et de courage, je ne pouvais me rendre compte de l'imprudence que je commettais. Ah ! si j'avais su !... Mais nous espérions quand même ; nous étions tous certains qu'il vivrait, et lui-même en exprimait le désir si ardemment que nous ne pouvions douter. - Le 9 avril, il m'écrivait ceci : "Sans la lire, du moment que vous me l'envoyiez, j'avais inséré la nouvelle de M. Polti. - Les épreuves m'arrivent ce matin, et pour corriger, il m'a bien fallu lire. Or, je ne puis pas publier une nouvelle comme celle-là. Comprenez-vous ? à cause de ma sœur et de la similitude entre la nouvelle et nous (elle et moi). Je ne puis vous donner de meilleure preuve de ma sincérité qu'en vous envoyant l'épreuve. La composition est faite, donc je la paierai. Vous ne pouvez, d'autre part, avoir de meilleur argument pour convaincre et ne pas froisser M. Polti, - en lui demandant autre chose. - Je suis peut-être absurde, mais vraiment non, je ne peux pas insérer cela. La valeur littéraire de la nouvelle n'est pas en cause. Et enfin vous me comprenez". Hélas ! oui, j'avais compris, - trop tard, certes, et je me reprochais amèrement de n'avoir pas su voir - avant - ce qui m'apparaissait alors et m'éblouissait jusqu'aux larmes... Je devais à la mémoire d'Albert Fleury, en publiant enfin, puisque aucun motif ne s'y oppose plus, les pages mystérieuses qu'on vient de lire, - de faire connaître ces circonstances qui le montrent tel qu'il fut et tel qu'il doit être désormais dans sa gloire."] (p. 9-19)

Cécile Périn : Verger, poème (p. 20)
[CHRONIQUES]
C[amille]. S[chiltz]., [Ernest] D[ufour]., H. Strentz, F. : Les Livres [La Science de l'Amour, J. Péladan (Messein, édit.) - signé D. (p. 21-22) ; Lectures et promenades, par Albert Heumann (E. Sansot et Cie, édit.) - signé F. (p. 22-23) ; Georges Périn : Les Rameurs (Grasset). - signé H. Strentz (p. 23-25) ; La Rouille, roman, par Emmanuel Bourcier (La Grande Revue, édit.) - signé C. S. (p. 25-26) ; Loïk, roman maritime, par Louis Alibert (H. Falque, édit.) - signé C. S. (p. 26-27) ; Deux romans de M. Maurice de la Perrière. - Le Jeu de l'Amour et de la Vie (Sansot, édit.), Une grande fête de charité (Jouve et Cie, édit.) - signé C. S. (p. 27-28)] (p. 21-28)
C[amille]. S[chiltz]. : Journaux & Revues [La presse qui prodigue son encre, qui la dépense en bordures de deuil, dès qu'il s'agit d'honorer les mémoires les plus contestables, pour peu que la mode les ait adoptées ; la presse qui ne se connaît plus devant les cercueils académiques et les cénotaphes les plus vides ; la presse qui ignorait Albert Fleury, - comme il était naturel qu'elle l'ignorât, - n'a pas daigné, à l'occasion de la mort de ce noble et pur poète, lui accorder l'hommage décent que nous attendions malgré tout. / Trois échos - dans Paris-Journal, l'Intransigeant et le Gil Blas - et c'est tout !... ; L'écho de Paris-Journal est dû à l'initiative de M. Maurice Beaubourg qui, n'écoutant que son cœur, voulait offrir beaucoup plus. Il paraît qu'on ne le lui permit pas... ; Quelques jours plus tard, Paris-Journal, qui est en coquetterie avec Francis Jammes, publiait de lui cette page émue... ; Les Treize de l'Intransigeant esquissèrent un portrait. On y peut relever quelques faux traits. Mais puisque ce n'est qu'une esquisse... ; M. Georges Pioch était pour Fleury un ami de vieille date. Il n'a pas voulu laisser partir le compagnon des premières luttes sans le saluer de la manière simple et digne qui nous émue en lisant ces lignes dans le Gil Blas... ; Les Revues, à l'exception du seul Mercure de France, sont muettes. Les Revues n'ont pas lu les journaux, ou si elles les ont lus, elles se sont souvenu qu'elles ne publient que de l'inédit. Pauvres Revues ! Dans son numéro du 1er novembre, le Mercure publie de M. Edmond Pilon, qui fut, lui aussi, un compagnon de jeunesse d'Albert Fleury, un court article d'une grande netteté, dont nous extrayons ces lignes... ; Dans le numéro suivant, nous trouvons enfin les paroles que nous attendions. Qu'il nous soit permis d'exprimer, ici, à celui qui les a prononcées, ces suprêmes et magiques paroles, toute notre reconnaissance, toute notre admiration pour la beauté, la rareté de la mission qu'il voulut remplir. Quand M. Maurice Beaubourg, qui ne le connaissait pas, qui n'avait jamais correspondu avec lui, écrivit à Albert Fleury à propos de ce poème que M. Edmond Pilon estime à si haut prix, il lui apporta la certitude qu'il avait atteint ces hauteurs mystérieuses accessibles seulement à quelques âmes élues...] (p. 29-40)
Document
"Journaux & Revues"
(extrait)
 Quelques jours plus tard, Paris-Journal, qui est en coquetterie avec Francis Jammes, publiait de lui cette page émue :

Il est difficile de témoigner de sa reconnaissance à un mort à qui on la doit. A un ennemi, c'est plus facile. Cependant, je préfère manquer à l'usage des lettres que de me taire tout à fait sur mon ami Albert Fleury, dont Paris-Journal a, l'un de ces derniers jours, annoncé la mort.
Maeterlinck a écrit quelque part que l'oeil est fait à l'image du soleil. Albert Fleury était fait à l'image de la douleur. C'est pourquoi, sur son lit d'agonie, il ressemblait au Christ.
Je ne l'ai connu que deux ans, mais je l'ai profondément aimé. Une lettre fort belle de Beaubourg fut l'un des suprêmes joies du poète. Cette lettre exprimait en termes excellents une admiration que d'autres témoigneront un peu tard à cette poésie lucide, sobre, bien française, et sœur un peu, vers la fin, de celle de Louis Le Cardonnel.
Toutes mes visites à Albert Fleury, durant ces deux années, se ressemblèrent, parce que je n'en retirai que du charme.
..................................................................................
Il me faisait l'éloge du cœur et du talent de Michel Abadie, et il avait raison.
Vers la fin de mes visites, son œil s'enflammait. Il ouvrait alors les poèmes de Charles Baudelaire ou ceux de Stéphanes Mallarmé. Comme il se prenait à tousser en lisant à haute voix, il me tendait le livre pour que je continuasse.
Sa sainte sœur l'observait avec une angoisse maternelle.
Sur une cheminée, Albert Fleury avait placé une toute petite chaise, et, sur cette chaise, cette inscription :
"La seule supériorité que je reconnaisse est la bonté." - BEETHOVEN.
Cet après-midi, en suivant la procession de la Fête-des-Morts, en compagnie de l'homme au cœur généreux qui me fit connaître Albert Fleury, je penserai à ce cher poète et à cette bonté qu'il eut.
FRANCIS JAMMES.
Orthez, 1er novembre 1911.